Le monde serait meilleur s’il n’avait plus ses brevets.
C’est ce que Michele Boldrin et David Levine, deux chercheurs en économie à l’Université de Washington à Saint-Louis, ont revendiqué lors des 15 dernières années. Les deux chercheurs pensent que les brevets nuisent au développement, et ont défendu leur idée peu commune mercredi lors de l’émission NPR « Planet argent. »
L’émission sur «Le réquisitoire contre les brevets » a été programmée après le geste audacieux du PDG de Tesla Elon Musk qui, en Juin, a libéré l’ensemble de ses brevets concernant sa voiture électrique et ces derniers sont donc tombés dans le domaine public. Il affirme que cette décision de laisser quiconque utiliser les idées de Tesla contribuera au développement de la technologie, même si elle élimine le contrôle exclusif de la société.
« Je ne les aime vraiment pas [les brevets] » a t-il dit lors d’une conférence téléphonique. « Qui en profite réellement? Je pense que c’est la bonne façon de faire. »
Boldrin et Levine ont dit lors de « Planet Money » que la décision de Musk n’était pas insensée du tout. Après tout, pour avoir une voiture électrique compétitive, vous avez besoin de la totalité de l’industrie de la voiture électrique. Il faut des gens pour travailler sur les stations de recharge, d’autres pour créer de meilleures batteries, et surtout, il en faut certains pour créer des entreprises concurrentes. En établissant les brevets gratuits, Boldrin et Levine pensent qu’il y a beaucoup plus de chances pour que dans le futur les parcs de stationnement des supermarchés soient remplis de Teslas.
Les deux chercheurs ont comparé la voiture électrique avec l’avion, à l’origine breveté par les frères Wright. Orville et Wilbur Wright ont été d’ardents défenseurs de ce brevet, qui peut avoir en fin de compte entravé le développement des avions en Amérique.
Dans un article sur le réquisitoire contre les brevets, Boldrin et Levine soutiennent qu’il n’y a pas de preuve tangible que les brevets accroissent la productivité. En fait, disent-ils, les brevets ont de nombreuses conséquences négatives. Les brevets peuvent effrayer les entreprises d’innover car ils se soucient constamment des poursuites en cas de violation de brevet, selon Boldrin et Levine.
Boldrin et Levine ont reconnu sur «Planet Money » que les brevets peuvent être utiles dans certains domaines, comme l’industrie pharmaceutique. Les fabricants de médicaments s’appuient sur les brevets afin d’empêcher les autres de voler les formules qu’ils ont passé des années à développer et les autres entreprises pourraient alors vendre le médicament à moindre coût – eux n’ayant pas dépensé des sommes colossales dans la recherche.
Dans un monde sans brevets, selon Levine, le gouvernement pourrait prendre un rôle plus important dans le développement de médicaments en finançant le développement initial et la recherche. Le gouvernement mettrait alors les médicaments des entreprises privées en concurrence afin de poursuivre le développement du médicament au prix le moins cher. Si le médicament fonctionne, l’entreprise gagnante obtiendrait une réduction du bénéfice.
Certains peuvent être sceptiques quant à la participation massive du gouvernement dans l‘industrie pharmaceutique mais Levine précise que le gouvernement finance déjà la recherche fondamentale dans les universités, et a mis en place des règles spéciales qui encadre le développement et la production de certains types de médicaments.