LES MESURES FINANCIERES ET LES MECANISMES JURIDIQUES ADAPTES A LA GESTION DE CRISE COVID-19

Le cabinet d’avocats ALMATIS et son avocat Maître Nicolas URBAN (téléphone : 0667333630) nous a autorisé à publier sa note sur les mesures financières à prendre et les mécanismes adaptés à la gestion de crise du COVID-19. Cette note est riche et précieuse pour prendre les bonnes décisions dans ce contexte exceptionnel. Les chefs d’entreprises doivent tout à la fois prendre les mesures d’urgence et de gestion courante pendant la période de confinement et d’interdiction d’activité (1ère étape « le Run ») mais, également anticiper et préparer l’avenir, c’est-à-dire la période qui suivra la levée partielle ou totale du confinement et où l’interdiction d’activité sera levée (2nd étape « le Build »).

Il est malheureusement évident que, dans ce second temps, au-delà de la perte de chiffre d’affaires pendant plusieurs semaines, la reprise de celui-ci ne sera pas au même niveau où il a été laissé. Pire encore, les difficultés que certaines entreprises rencontraient déjà avant l’épidémie du Covid-19 se seront aggravées et multipliées. De nouvelles mesures devront donc être prises pour faire face à des difficultés financières toujours présentes liées à une exploitation extrêmement fragile et une trésorerie inexistence et se reconstituant que lentement.

1ère étape : La gestion de l’urgence et de l’activité courante (« le Run »)

  1. La nécessité d’établir un prévisionnel de trésorerie fondé sur plusieurs hypothèses de chiffre d’affaires

Avant toute chose, le chef d’entreprise doit impérativement avoir une photographie de la situation, une analyse précise de la trésorerie pour apprécier les conséquences de la baisse brutale ou de l’arrêt du chiffre d’affaires, d’une rupture d’approvisionnement, d’une fermeture d’établissement, d’un chômage partiel de tous les salariés, etc…

En effet, cette analyse doit intégrer ces différentes hypothèses, en fonction des spécificités de l’activité de l’entreprise, de son organisation et de sa situation géographique.

Ce prévisionnel permettra alors au chef d’entreprise d’identifier le niveau de trésorerie réellement disponible dans la durée. Ce diagnostic préalable est indispensable puisqu’il permet d’anticiper les risques de manque de trésorerie dans le temps et ainsi, de les éviter en mettant en œuvre des actions appropriées selon un calendrier déterminé pour ne procéder qu’aux règlements des charges indispensables à la survie de l’entreprise.

  1. Les leviers de trésorerie
  1. La suspension des règlements de créances publiques fiscales et sociales
  1. Le report de paiement de tous les impôts directs des entreprises peut être accordé pour trois mois sans justificatif

Les entreprises peuvent demander au service des impôts des entreprises le report sans pénalité du règlement de leurs prochaines échéances d’impôts directs (acompte d’impôt sur les sociétés, taxe sur les salaires, CFE, CVAE).

Si les échéances du mois de mars ont déjà été réglées, deux solutions peuvent se présenter :

  • Les entreprises qui en ont encore la possibilité peuvent s’opposer au prélèvement SEPA auprès de leur banque en ligne ;
  • A défaut, elles peuvent en demander le remboursement auprès de leur service des impôts des entreprises, une fois le prélèvement effectif.

En revanche, les demandes de remises d’impôts directs doivent être justifiées, celles-ci ne pouvant être accordées qu’en cas de difficultés caractérisées qu’un report de paiement ne suffit pas à surmonter.

Pour les travailleurs indépendants, il est possible de moduler à tout moment le taux et les acomptes de prélèvement à la source. Il est aussi possible de reporter le paiement des acomptes de prélèvement à la source sur les revenus professionnels d’un mois sur l’autre jusqu’à trois fois si les acomptes sont mensuels, ou d’un trimestre sur l’autre si les acomptes sont trimestriels. Toutes ces démarches sont accessibles via l’espace particulier sur impots.gouv.fr, rubrique « Gérer mon prélèvement à la source » : toute intervention avant le 22 du mois sera prise en compte pour le mois suivant.

Les contrats de mensualisation pour le paiement du CFE ou de la taxe foncière peuvent être suspendus sur impots.gouv.fr ou en contactant le Centre prélèvement service : le montant restant sera prélevé au solde, sans pénalité.

Pour faciliter l’ensemble des démarches, la DGFIP met à disposition un modèle de demande, disponible sur le site impots.gouv.fr, à adresser au service des impôts des entreprises.

Pour toute difficulté dans le paiement des impôts, les entreprises sont invitées à se rapprocher du service des impôts des entreprises, par la messagerie sécurisée de leur espace professionnel, par courriel ou par téléphone.

  • En revanche, la TVA et les taxes assimilées sont exclues de la mesure de même que le reversement du prélèvement à la source effectué par les collecteurs
  • Report possible jusqu’à trois mois sans pénalité du règlement de la part salariale et patronale des charges sociales pour le mois de mars 2020
  1. La renégociation des dettes bancaires en cours auprès des banques habituelles

Le chef d’entreprise doit impérativement garder le lien avec ses partenaires bancaires et ne pas se limiter à bloquer les règlements. Pour cela, il doit informer ses banques du diagnostic préalable qu’il a fait et du niveau de trésorerie réelle de l’entreprise afin de trouver avec ces partenaires les solutions appropriées pour alléger, pendant une période déterminée, la trésorerie du remboursement des échéances de crédits moyen et long terme. Ces solutions passeront principalement par une renégociation des échéanciers de règlements (allongement, gel partiel ou totale pendant une période déterminée, augmentation du découvert, etc..)

Par ailleurs, l’Etat a annoncé que, le cas échéant, l’appui de la Banque de France pourra être sollicité pour favoriser l’adoption de plans d’étalement des créances.

  1. L’intervention de BPI France

Il faut distinguer :

  • Le traitement des crédits existants octroyés ou garantis par BPI, (c.1)
  • L’octroi de nouveaux concours/garantis par BPI (trois dispositifs distincts à ce jour). (c.2)
  1. Traitement des crédits existants octroyés ou garantis par BPI

Tout d’abord, pour les entreprises disposant déjà d’emprunts ou de lignes de crédit-bail immobilier auprès de BPIFRANCE FINANCEMENT, l’ensemble des échéances de prêt (capital + intérêts) ainsi que loyers de crédit-bail immobilier sont reportés automatiquement pour une durée de six mois et sans frais de dossier. 

S’agissant des financements bancaires existant garantis par BPI France, un report d’échéances pourra être accordé sur demande à votre interlocuteur bancaire habituel. Ce dernier transmettra alors la demande de report de la garantie à BPI France, qui la traitera, sans coût additionnel.

  • Octroi de nouveaux concours/garanties BPI

Avant de présenter sommairement ces mesures, il faut souligner les conditions d’éligibilité des dispositifs.

Pour l’instant, ces dispositifs semblent exclure :

  • Les entreprises faisant déjà l’objet d’une procédure collective,
  • Mais non celles en procédures amiables pour autant qu’elles ne soient pas en difficulté selon les critères usuellement retenus par l’Union Européenne, à savoir :
  • Pour les PME : disposer de capitaux propres supérieurs à la moitié du capital social sur l’exercice 2018 (seul critère pour les PME),
  • Pour les structures plus importantes : présenter un ratio emprunts/capitaux propres inférieur à 7,5 sur 2018 et 2017 et présenter un ratio de couverture des intérêts sur la base de l’EBITDA supérieur à 1,0 sur 2018 et 2017.
Objet : Dispositif ayant vocation de garantir la mise en place ou le renouvellement de lignes de crédit court terme confirmé, destinées au financement du cycle d’exploitation des entreprises.  
Concours concernés : Crédits à court terme (découverts, facilités de caisse, escomptes, Dailly, Mobilisations de Créances Nées à l’Export dit MCNE) nouvellement mis en place ou confirmés sur une durée de 12 mois minimum à 18 mois maximum.  
Bénéficiaire : PME et ETI, quelle que soit leur date de création.
  • Fonds de garantie « renforcement de trésorerie CORONAVIRUS »
Objet : Entreprises éligibles et projets accompagnés : Ce fonds a pour vocation de garantir les opérations de renforcement de la structure financière des PME, notamment par consolidation à moyen terme des concours bancaires à court terme. Les crédits de consolidation doivent s’accompagner d’une augmentation ou au moins d’un maintien des concours bancaires globaux.   Cette garantie s’adresse à des entreprises rencontrant ou susceptibles de rencontrer des difficultés de trésorerie qui ne sont pas d’origine structurelles.    Cette garantie s’adresse aux TPE, PME et Entreprises de Taille Intermédiaires indépendantes (ETI) quelle que soit leur date de Création.   Peuvent être garantis les nouveaux financements amortissables (crédit ou crédit-bail), à moyen ou long terme, permettant : Le renforcement du fonds de roulement. Le financement relais (amortissable, 2 ans mini) d’un crédit d’impôt ou d’une subvention La consolidation des crédits à court terme existants (découvert, caisse, escompte, affacturage, mobilisation de créances). L’externalisation d’actifs dans le cadre d’une cession bail ou d’une vente d’actifs à une société de portage (SCI par exemple) ayant majoritairement les mêmes associés que la société d’exploitation et se traduisant par un apport de trésorerie à son profit,   Sont également éligibles : Les prêts personnels aux dirigeants pour réaliser des apports en fonds propres à l’entreprise. L’acquisition d’une entreprise dans le cadre d’un plan de cession homologué après redressement judiciaire, sous réserve que les repreneurs n’aient pas été impliqués dans la gestion de l’affaire reprise.   Sont exclus : Les prêts in fine. Le refinancement des encours de crédit à moyen ou long terme. Les opérations purement patrimoniales (cash out, vente à soi-même). Le remboursement des obligations convertibles. Les opérations relatives au rachat de crédits.  
Bénéficiaires : PME et ETI, quelle que soit leur date de création.  
Modalités : Concours garantis : Prêts à long et moyen terme,Crédits-bails mobiliers et immobiliers, locations financières.   Durée de la garantie : La durée, égale celle du crédit, est comprise entre 2 et 7 ans. Elle peut être portée à 15 ans maximum lorsque le crédit est assorti d’une sûreté sur un actif immobilier ou en cas de cession bail immobilière.   Plafond de risques maximum (toutes banques confondues) : 5 millions € sur une même entreprise ou groupe d’entreprises pour les PME, 30 millions € sur une même entreprise ou groupe d’entreprises pour les ETI
  • Dispositif « Prêt Atout »

Le Prêt Atout renforce la trésorerie de l’entreprise pour lui permettre, dans un contexte conjoncturel exceptionnel, de résoudre ses tensions de trésorerie passagères (et non structurelles), dans l’attente d’un retour à des conditions normales d’exploitation.

Objet : Besoin de trésorerie ponctuel L’augmentation exceptionnelle du BFR, liée à la conjoncture  
Caractéristiques : Durée comprise entre 3 et 5 ans assortie de 6 à 12 mois de différé d’amortissement du capital.  
Conditions : Il devra notamment être associé à un crédit bancaire du même montant (pouvant lui-même être contre-garanti par BPI dans le cadre du dispositif précédent).  
  • Le « Prêt Rebond »

Par l’intermédiaire des régions, le Prêt Rebond de 10 à 300.000 € est bonifié sur une durée de 7 ans avec 2 ans de différé.

  1. Vers la création d’un fonds de solidarité pour les TPE

Dans le cadre d’un plan de protection des entreprises réalisant un chiffre d’affaires de moins de 1 million d’euros, un fonds de solidarité devrait être créé, ce dispositif permettant également à l’Etat et aux Régions de traiter individuellement la situation des entreprises les plus menacées.

  1. L’arrêt du règlement des fournisseurs non stratégiques

La renégociation des délais de règlement avec les fournisseurs « non stratégiques », voir la suspension des règlements peut être envisagée. Cependant, cette mesure doit être maniée avec précaution en analysant les conditions générales qui ont pu être signées avec les fournisseurs qui pourraient prévoir les mesures « punitives » en cas de défaut de paiement. Un effet de levier immédiat sur la trésorerie pourrait alors se transformer à terme en un piège générant de nouvelles difficultés financières.

Il est donc recommandé de mener de telles négociations dans un cadre juridique et judiciaire adaptée, tel que décrit dans des développements ultérieurs.

  1. Le cas particulier du bailleur

Le Président de la République a annoncé lors de sa première allocution liée au Covid-19, parmi les mesures visant à protéger les PME, la « suspension des factures d’eau, de gaz ou d’électricité ainsi que les loyers. »

Le Ministre de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire, a récemment annoncé que l’épidémie de Coronavirus devait être considérée comme « un cas de force majeure pour les entreprises, salariés et employeurs ». Cette déclaration, limitée aux « marchés publics de l’Etat », n’a évidemment pas pour effet de transformer l’épidémie de Coronavirus en évènement de force majeure justifiant l’inexécution de toutes les obligations contractuelles de droit privé.

Dans l’attente de connaître précisément les contours de cette mesure concernant le paiement des loyers commerciaux en période de confinement, et alors que certains bailleurs institutionnels annoncent eux-mêmes des mesures de suspension en faveur des commerces de proximité, il faut être prudent et ne pas prendre cette annonce concernant les loyers « au pied de la lettre » tant elle questionne au regard des règles de droit applicables.

En effet, si les conditions d’extériorité et d’imprévisibilité – qui caractérisent le force majeur – ne posent pas de difficulté, il n’en est pas de même s’agissant de la condition d’irrésistibilité puisque l’article 1218 du code civil précise que la force majeure est l’événement « dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées » et qui « empêche l’exécution de son obligation par le débiteur ».

La première hypothèse est celle dans laquelle un arrêté a interdit l’ouverture d’un local commercial exploité en vertu d’un bail en raison de sa destination. Dans un tel cas, le bailleur n’est plus en mesure de satisfaire à son obligation de délivrance en raison d’un évènement de force majeure qui aura pour effet de suspendre l’exécution du contrat par les parties.

Dans ce cas, les entreprises dont l’activité économique est consubstantiellement attachée à l’exploitation de leur local commercial (tout le commerce de détail notamment), peuvent, sans prendre de risque inconsidéré selon nous, suspendre le paiement de leurs loyers.

La seconde hypothèse, qui est celle dans laquelle le preneur à bail ne peut plus assurer le paiement des loyers en raison d’un manque de trésorerie lié à l’épidémie de Covid-19, est plus délicate. En effet, d’une part, le bailleur ne manque pas ici à son obligation de délivrance et, d’autre part, dans un pareille cas la jurisprudence considère que « le débiteur d’une obligation contractuelle de somme d’argent inexécutée ne peut s’exonérer de cette obligation en invoquant un cas de force majeur ».

Cependant, il faut noter que certaines Cours d’appel ont retenu que la survenance d’une épidémie rendant impossible l’exécution de l’obligation en paiement caractérisait la condition d’irrésistibilité de telle sorte que la force majeure pouvait être retenue.

En conclusion, ce n’est que dans le cas d’une impossibilité totale de payer le loyer par la survenance de l’épidémie du Covid-19 que le chef d’entreprise pourrait être déchargé de son obligation de payer les loyers.

  1. Le maintien absolu du lien social et du management

Toutes ces mesures sociales n’ont de sens et d’efficacité qu’autant qu’elles sont prises dans un cadre où le lien social à l’intérieur de l’entreprise et le management sont assurés.

La gestion d’une crise nécessite de la solidarité entre ceux qui participent à cette gestion.

Malgré le confinement et l’organisation en télétravail pour la plupart, l’entreprise reste un « corps social » qui doit continuer d’exister. Le chef d’entreprise doit donc à tout prix trouver les moyens de continuer à assurer le lien social entre les salariés et le management à travers une communication permanente entre les équipes. Animer, communiquer et informer restent les maîtres mots de ce lien social pour assurer la continuité et envisager la suite. Il ne faut rien cacher des difficultés, expliquer, faire comprendre et faire participer tout le monde.

Cette gouvernance particulière doit reposer plus sur le partage de compétences que la hiérarchie. Il est ainsi souhaitable de mettre en place une cellule de crise pour gérer le quotidien.

  1. Les outils juridiques et judiciaires de prévention et de traitement des difficultés
  1. Les procédures amiables dites de prévention des difficultés

Ces procédures ont pour intérêt de traiter en amont les difficultés de l’entreprise et de se mettre très tôt « sous la protection » du tribunal, et l’assistance d’un mandataire de justice dans un cadre non contraignant, souple et parfaitement confidentiel. Cette procédure encadrée a pour effet de rassurer les créanciers qui sont dès lors enclins à négocier.

Ces procédures permettent ainsi de négocier avec les principaux créanciers des échéanciers de règlement, des remises, des crédits et d’autres mesures permettant la poursuite d’activité et de mettre un terme aux difficultés et ce, dans le cadre d’un accord confidentiel ou non, selon la volonté du chef d’entreprise, ayant force obligatoire entre ses signataires.

  1. La conciliation

La procédure de conciliation est avec le mandat ad-hoc et la procédure de sauvegarde l’un des piliers de la prévention des difficultés des entreprises.

La procédure de conciliation, qui est confidentielle (comme le mandat ad-hoc, et à la différence de la procédure de sauvegarde), a pour objet de rechercher un accord amiable entre l’entreprise et ses principaux créanciers et partenaires, afin de résoudre les difficultés qu’elle peut rencontrer.

La procédure de conciliation s’adresse à toute entreprise commerciale, artisanale, ou libérale (personne physique ou morale) ainsi qu’aux associations, aux auto-entrepreneurs et aux entrepreneurs individuels à responsabilité limitée (EIRL). Elle ne concerne pas les agriculteurs qui bénéficient d’une procédure analogue organisée par le code rural.

Pour y faire appel, l’entreprise doit rencontrer des difficultés juridiques, économiques ou financières existantes ou prévisibles, mais ne doit pas se trouver en état de cessation des paiements, ou alors l’être depuis moins de 45 jours (c’est une différence avec le mandat ad-hoc ou la procédure de sauvegarde qui suppose l’absence d’état de cessation des paiements).

Le conciliateur a pour mission de favoriser la conclusion d’un accord amiable, entre le débiteur et ses principaux créanciers et partenaires, destiné à mettre fin aux difficultés de l’entreprise et assurer sa pérennité. Le conciliateur peut présenter des propositions en vue de la sauvegarde de l’entreprise, de la poursuite de l’activité et du maintien de l’emploi.

  • Le mandat ad hoc

La procédure de mandat ad hoc est considérée comme une procédure autonome de prévention des difficultés des entreprises qui se caractérise par sa souplesse et sa confidentialité.

Elle est souvent utilisée comme un préalable à la procédure de conciliation ou de sauvegarde. Le but est de rétablir la situation de l’entreprise avant qu’elle ne soit en état de cessation des paiements.

  • La procédure de sauvegarde

Cette procédure est ouverte à toute entreprise qui, sans être en état de cessation des paiements, connait des difficultés qu’elle ne peut pas surmonter. Cette procédure n’est pas confidentielle mais, elle a pour effet principal, à compter de son ouverture par le tribunal, de geler provisoirement les paiements des dettes nées antérieurement à l’ouverture de la procédure de sauvegarde.

Une fois cette procédure ouverte, une période d’observation de 6 mois, renouvelable, est ouverte permettant au début de faire un bilan détaillé de l’état de l’entreprise (trésorerie, comptabilité, management, social, commercial, juridique, etc.). Ensuite, cette période vise à rechercher e mettre en place, si elles existent, les mesures de restructuration nécessaires et de reconstitution de la trésorerie.

Enfin, cette procédure a vocation à permettre la poursuite de l’activité dans une perspective de résolution des difficultés, qui étaient jusqu’alors insurmontables, par la mise en œuvre d’un plan de sauvegarde organisant principalement le règlement échelonné des créanciers pouvant aller jusqu’à dix ans.

Dans le cadre de cette procédure, le plus souvent, le chef d’entreprise est assisté d’un administrateur judiciaire. L’entreprise est sous la surveillance du tribunal par l’intermédiaire d’un juge commis désigné. Un mandataire judiciaire est également désigné pour représenter les créanciers.

  1. Les procédures curatives dites de traitement des difficultés

Cette note n’a pas pour objet d’exposer en détail ces procédures mais, seulement, à ce stade, d’attirer l’attention du chef d’entreprise sur la nécessité de mettre en œuvre le plus tôt possible de telles procédures de traitement des difficultés, ne serait-ce que pour éviter la mise en cause de la responsabilité des dirigeants, et sur l’intérêt de ces procédures pour redresser une entreprise ou, à défaut, sauver les actifs et les emplois.

  1. Le redressement judiciaire

Alors que pour être éligible à une procédure de sauvegarde l’entreprise ne doit pas être en état de cessation des paiements, la procédure de redressement judiciaire est destinée à toute entreprise qui est en état de cessation des paiements. Plus encore, toute entreprise qui constate son état de cessation des paiements a 45 jours pour régulariser une déclaration de cessation des paiements et solliciter l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire, s’il existe de telles chances de redressement.

Pour le reste, le redressement judiciaire fonctionne pour l’essentiel comme une procédure de sauvegarde, et on peut distinguer trois phases: l’ouverture de la procédure, la période d’observation et la solution au redressement ( qui à la différence de la procédure de sauvegarde peut permettre une cession d’entreprise).

  • La liquidation judiciaire

Lorsqu’il n’existe pas de chance de redressement et que l’entreprise est en état de cessation des paiements, le chef d’entreprise doit également solliciter l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire (qui peut s’accompagner d’une poursuite d’activité pour un temps déterminé) dans un délai de 45 jours à compter de la constatation de l’état de cessation des paiements.

Cette procédure de liquidation judiciaire peut être l’opportunité de céder l’entreprise, en assurant le transfert de tout ou partie des contrats de travail, ou des actifs isolés de l’entreprise pour ne pas voir tout disparaître.

  1. Les mesures sociales
  1. La mise en chômage partielle

Ce dispositif permet, si l’entreprise administrée est touchée par une baisse d’activité, d’éviter d’avoir à licencier tout ou partie de votre personnel. Vous pouvez ainsi placer vos salariés en position d’activité partielle si votre entreprise est contrainte de réduire ou suspendre temporairement son activité (Code du travail, art. R. 5122-1).

Il peut être sollicité dans le cadre de circonstances à caractère exceptionnelle.

Pendant une période d’activité partielle, les salariés restent liés à l’entreprise par un contrat de travail, mais subissent une perte de salaire imputable soit :

  • A la fermeture temporaire de votre établissement ou d’une partie de votre établissement ;
  • A la réduction de l’horaire de travail habituellement pratiqué au sein de votre entreprise.

Différents cas de figure peuvent se manifester dans le cadre de l’épidémie liée au Coronavirus, en fonction desquels le périmètre des salariés pouvant être placés en activité partielle devra être ajusté.

Par exemple :

  • Fermeture administrative de l’établissement,
  • Absence massive de salariés indispensables à l’activité de l’entreprise : si les salariés indispensables à la continuité de l’entreprise sont contaminés par le coronavirus/en quarantaine rendant ainsi impossible la continuité de l’activité, les autres salariés peuvent être placés en activité partielle,
  • Interruption temporaire des activités non essentielles,
  • Baisse d’activité liée à l’épidémie : les difficultés d’approvisionnement, la dégradation de services sensibles, l’annulation de commandes etc. sont autant de motifs permettant de recourir au dispositif d’activité partielle.

Lorsque les salariés sont placés en position d’activité partielle, leur contrat de travail est suspendu (partiellement ou totalement) mais non rompu. Ainsi, sur les heures ou périodes non travaillées, vos salariés ne doivent pas être sur leur lieu de travail.

Le contrat de travail étant suspendu, les salariés perçoivent une indemnité compensatrice versée par l’entreprise. Cette indemnité doit au minimum être égale à 70 % de la rémunération antérieure brute.

Selon Muriel Pénicaud, cela correspond à environ 84 % de leur salaire net. Vous pouvez tout à fait augmenter ce montant. Muriel Pénicaud a annoncé que les salariés au SMIC percevraient un montant égal au SMIC. L’indemnité d’activité partielle versée au salarié est exonérée des cotisations salariales et patronales de sécurité sociale.

L’indemnité d’activité partielle est assujettie à la CSG au taux de 6,2 % et à la CRDS au taux de 0,50 %.

Ces deux contributions sont calculées sur la base de 98,25 % de l’indemnité versée (après application d’un abattement de 1,75 % pour frais professionnels).

À savoir :

  • Les retenues de CSG et de CRDS opérées sur l’indemnité d’activité partielle ne doivent pas avoir pour effet de réduire la rémunération à un montant inférieur au 1 539,42 €.
  • En cas de formation pendant l’activité partielle, cette indemnité est portée à 100 % de la rémunération nette antérieure.
  • Les heures indemnisables correspondent aux heures non travaillées par les salariés.

A noter : Sur les bulletins de salaire, précisez bien les termes « Activité partielle » et le nombre de jours non travaillés au titre de celle-ci. Il incombe à l’employeur de bien définir la planification des périodes travaillées avec les périodes d’activité partielle. Cette information doit être portée à la connaissance des élus du CSE également.

Financièrement, le principe est celle de l’avance de fond par l’entreprise. Cette dernière verse donc le salaire mensuel intégrant les heures d’activité partielle (dont le montant est minoré) puis adresse une demande de remboursement au service compétent.

Cette demande de remboursement est mensuelle et est réalisée en ligne. Les délais de remboursement ne sont pas précisés mais les services compétents annoncent un délai de remboursement de 10 jours.

Compte tenu de l’afflux de demandes, il est probable que ce délai soit allongé. Le remboursement par l’Etat s’opère sous la forme d’une allocation forfaitaire dont le montant est fixé comme suit :

• 7,74 euros si votre entreprise compte entre 1 et 250 salariés ;

• 7,23 euros si votre entreprise compte plus de 250 salariés.

Dans un premier temps, le Gouvernement envisageait d’augmenter le montant de cette allocation en la portant ainsi à 8,04 euros pour les entreprises de moins de 250 salariés. Ce qui correspond à un SMIC net. Mais, vendredi 13 mars 2020, Muriel Pénicaud a annoncé que les employeurs, quel que soit l’effectif de l’entreprise, seraient remboursés à 100 % de l’indemnité versée à compter de lundi 16 mars 2020.

A noter :  De façon exceptionnelle, en cas de de difficultés financières de l’employeur (procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire), le préfet du département peut faire procéder au paiement direct de l’allocation aux salariés.

La mise en place pratique de cette dérogation n’est toutefois pas définie. Compatibilité entre activité partielle et prise en charge AGS ? Les heures prises en charge au titre de l’activité partielle ne seront pas prises en charge par l’AGS même à titre d’avance.

La mise en place de l’activité partielle est une mesure destinée à sauvegarder l’emploi dans les entreprises. Elle peut paraître incompatible avec la mise en œuvre concomitante d’une procédure de licenciement pour motif économique.

Toutefois, les dispositions légales n’imposent aucun engagement en terme de maintien dans l’emploi des salariés bénéficiaires sauf lorsque l’entreprise a déjà pu bénéficier d’une convention d’activité partielle au cours des 3 dernières années (dans cette hypothèse, des contreparties peuvent être exigées de la part de l’Etat notamment en terme de maintien dans l’emploi).

Il en résulte que c’est la convention d’allocation partielle qui fixera les engagements éventuels exigés en matière de maintien dans l’emploi par l’administration du travail. Juridiquement, il n’y a pas d’impossibilité de mettre en œuvre un plan de réorganisation et de restructuration portant sur une partie des effectifs alors même que la société bénéficie d’une convention d’activité partielle.

Bien entendu, cette question doit faire l’objet d’échanges préalables avec les interlocuteurs de la Direccte compétente.

  1. Le cas de l’arrêt maladie

Dans le cadre des mesures visant à limiter la diffusion du coronavirus Covid-19, les autorités publiques ont décidé la fermeture jusqu’à nouvel ordre de l’ensemble des structures d’accueil de jeunes enfants et des établissements scolaires.

Un téléservice, « declare.ameli.fr », est mis en place par l’Assurance Maladie pour permettre aux employeurs de déclarer leurs salariés contraints de rester à domicile suite à la fermeture de l’établissement accueillant leur enfant, sans possibilité de télétravail.

Cette déclaration fait office d’avis d’arrêt de travail. Ce dispositif concerne les parents d’enfants de moins de 16 ans au jour du début de l’arrêt. Les parents d’enfants en situation de handicap de moins de 18 ans pris en charge dans un établissement spécialisé sont également concernés.

Dans ce contexte, la prise en charge de l’arrêt de travail se fait exceptionnellement sans jour de carence et sans examen des conditions d’ouverture de droit. L’arrêt peut être délivré pour une durée de 1 à 14 jours. Au-delà de cette durée, la déclaration devra être renouvelée autant que de besoin. Il est possible de fractionner l’arrêt ou de le partager entre les parents sur la durée de fermeture de l’établissement. Un seul parent à la fois peut se voir délivrer un arrêt de travail.

Le téléservice « declare.ameli.fr » de l’Assurance Maladie permet à l’employeur de déclarer l’arrêt de travail pour ses salariés. Il s’applique aux salariés du régime général, salariés agricoles, marins, clercs et employés de notaire, les travailleurs indépendants et travailleurs non-salariés agricoles et agents contractuels de la fonction publique. Les autoentrepreneurs se déclarent eux-mêmes dans le téléservice.

2nd Etape : Et après … : anticiper la sortie de crise et la préparation de l’avenir (« le Buid »)

Dans la crise, il faut déjà préparer la sortie de crise pour ne pas y rester.

Ainsi, au-delà de la création d’une cellule de crise il est recommandé de mettre en place une cellule stratégique pour déjà réfléchir à l’avenir, aux mesures qu’il faudra mettre en œuvre quand recommencera l’activité.

Bien évidemment, toutes les mesures détaillées ci-avant – notamment les mesures de prévention et de traitement des difficultés – peuvent continuer à être mise en œuvre lorsque l’activité reprendra puisque sans doute, malheureusement la reconstitution du chiffre d’affaires ne sera pas tout de suite au rendez-vous et l’endettement n’aura pas encore été résorbé.

D’expérience, trop souvent, les chefs d’entreprise attendent trop longtemps pour décider de mettre en œuvre de telles procédures amiables ou judiciaires. Or, c’est trop souvent ce retard qui empêche le succès de telles procédures qui doivent se préparer en amont.

Notre cabinet est là pour vous accompagner dans ces étapes. N’attendez pas qu’il soit trop tard.

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